mardi 21 août 2012

Prise de tête.





Les vacances c’est bien, on peut profiter. Le soleil brille, les grillons grillonnent, les cigales chantent, et les grimpeurs crient, râlent aux pieds des falaises. Des cris d’encouragements par les foules présentes, des hurlements de rage pendant les essais victorieux ou infructueux, les grimpeurs sont assurément la faune la plus bruyante, en falaise, pendant cette période d’été. Rajoutons à tout cela les pleurs des marmots empressés de dévorer le repas du jour, ou tentant de se soustraire à l’autorité parentale par un caprice, et vous aurez un petit aperçu des journées épuisantes de LaCombe dans le Guillestrois.





Le mois de Juillet se déroula comme le précédent, entre pluie et soleil, principalement au Marocaz, où l’atmosphère était encore la meilleure, car la plus fraîche. Quelques tentatives à l’extérieur néanmoins avec Luca à Cessens grotte pour dérouler dans Le Yack a tout pété 7c+, ou encore dans La bomba à papa 7b+, puis avec Victor au col du Chat dans Chat ki ra en 7c+ histoire de faire une pause psychologique et voir autre chose que ma bête noire. De quoi s’agit-il ?  Non, ce n’est pas le petit surnom donné à SoSo après plusieurs mois sans rendez-vous chez l’esthéticienne, mais simplement d’une voie qui me résistait depuis bientôt trois mois. Les 8a+ ne se laissent pas faire si facilement, et pour vaincre les difficultés d’Une émeraude en or, il m’aura fallu beaucoup de courage et de détermination. Quelques cris d’énervements viendront toutefois troubler le calme des lieux lorsqu’à deux reprises j’arrivais à attraper le petit plat décisif main gauche sans pouvoir remonter mon pied droit sur une fausse prise que je m’évertuais à prendre. Rien de pire en escalade que de s’acharner dans ses méthodes en bois de cagette alors qu’il suffisait de forcer un peu plus, les pieds plus haut. Pour les amateurs de chiffres débiles, cela aura représenté un travail de 12 séances, à raison de 4-5 essais par séance soit une bonne quarantaine d’essais dans une voie de 25m, soit 1000 mètres de 8a+... Enorme… Relativisons car la moitié des séances ont été passées à trouver les vraies méthodes à travers le dédale de prises humido-mouillées de cette face, de plus la voie n’est pas une base d’homogénéité car la première partie en 7b de continuité à tendance à nous endormir au moment où il faut mettre les watts pour passer le crux du haut. Une voie d’un effort comparable à Rigpa ou la nature de l’esprit à Baume rousse, pour les connaisseurs, tellement dans mon anti-style. Ma fierté aura été d’apporter cette voie « sur un plateau » à Victor, qui plia l’affaire de la plus belle des manières en quelques essais seulement. Comme quoi la sagesse du vieux loup dégarni  peut encore servir aux plus jeunes, enfin pour Antoine je ne peux plus rien…







 Certains disent en Août, pâté en croûte. Je dirais plutôt, en Août perfo en route. LaCombe dans sa recherche effrénée de la falaise la plus bousique a enfin trouvé une petite perle. 10 à 15 m de haut, du léger dévers à 2 min de la voiture, visible de la route, que seuls les courageux et les idolâtres des bouses de Savoie sauront apprécier si la vue depuis la route ne les a pas déjà rebutés. Le perfo a donc chauffé en ce début Août, et avec Victor, nous espérons que notre travail ne sera pas vain, et que quelques lignes sympas seront parcourues. Enfin pour le moment presque tout reste à faire et même si la majorité des voies seront dans le 6ème degré, on espère bien sortir une ligne plus dure de ce tas de caillou, un 7 tas ou pourquoi pas un 8 tas…

Attention les yeux...
En Août on prend aussi la route… Cette année direction les Hautes-Alpes et Guillestre pour se déchirer les doigts sur le conglomérat de Mont-Dauphin. Dans cette grande aventure, LaCombe avait convié un panel hallucinant de stars de l’escalade. En effet, nous allions grimper avec Sieur Vigier, une légende de la grimpe sur Grenoble, imprésentable, en compagnie de sa petite famille, puis avec AK et Cath, les terreurs de Venasque, et même avec Toto, du team JeGrimpe.com, une vraie machine. Pour compléter l’affiche, on pouvait aussi compter sur Yaya et Blanblan du team Edelrid, comme le laisse à penser leur voiture. Avec une fine équipe comme celle-là, aucun compromis, ce serait La Rue des masques et rien d’autre, par tous les temps et jusqu’à point d’heure ; une spécialité de sudistes célibataires. Parlons un peu de ce secteur. Une sorte de petite Margalef, dixit AK, avec les pouerks à chien en moins, bien orienté pour l'été. Pour en finir avec les comparaisons douteuses, on pourrait presque la rapprocher de Céüse au niveau du nombre de grimpeurs et des nationalités représentées, avec néanmoins une dominante d’italiens. Très enthousiasmé au début, par cette escalade atypique sur trous et galets de toutes tailles, très en force et très conti, au fil des jours, le moral n'y était plus. Le contexte, le monde, le style long ne me motivait plus. Les hommes en forme, eux, perfaient tout à vue, flash, ou au premier essai, jusqu'au 8a. La Rue se transformait alors en un véritable champ de bataille tant les croix tombaient. Parmi les belles réalisations, on pourra noter le 7c+ de La légende directe, flashée par Toto, qui ne vit aucune difficulté, ou encore son à vue de Violant cop en 7c mais aussi l’enchaînement commun de Ciao criquet 8a, la seule festivité à laquelle je pus participer. Passons rapidement sur la coche des classiques du secteur tels la Truite et le Druide, tous deux 7c, comme des 7a et 7b rapidement avalés et vous aurez une idée sur la forme des bougres, toujours avides de grimpe même après 20h00. Nous ne vivons définitivement plus sur la même planète, déjà que nos goûts en matière de grimpe sont différents, je cherche les pires bouses de 15m de haut alors qu'ils cherchent les voies qui "déroulent" sur bonnes prises de 40m de haut, maintenant ils torchent les 7c+ et les 8a dans la séance alors qu'il me faudra deux semaines pour arriver à les faire... si la chance est de mon coté, sur un malentendu... Il fallut attendre la deuxième semaine pour que la caisse revienne, toujours sur mon bloc de la Rue, choix judicieux pour être tranquille en cette période n'en déplaise à AK, je parvins à faire deux 7c dans la journée, Affreuse sale et méchante, comme Minette ce jour là, et Nique la police, bourrin juste comme il faut.






  
Sur la fin du séjour, las de la Rue des masques, du monde, de la poussière, du papier cul négligemment laissé par terre par toute la population grimpante, nous décidâmes de retourner à Panacelle, secteur historique, en compagnie de NiKo et de sa Loutre spécialement descendus de la Dibona pour en découdre avec ces couennes. Le style de grimpe change radicalement. Ici tout ce passe dans les doigts et sur les pieds. Petites réglettes, bossettes fuyantes, l'escalade est très technique et obligatoire. Dans un secteur moderne, quand les points sont rapprochés, le grimpeur peut être sur que le crux est là, dans un secteur historique c'est l'inverse, quand il n'y a plus de points, vous êtes dans le crux. Cela rend les passages obligatoires et l'escalade psychologique. Rajoutons à cela un tracé jamais rectiligne et vous aurez toutes les peines du monde à faire un "à vue", sauf pour Yaya, l'homme aux doigts d'acier, qui se débrouille à merveille dans ce style.









Bon, nous sommes arrivés à grimper un peu quand même. La preuve, Bonsaï , 7c+ historique, court et péchon, tombe trop rapidement alors que je testais juste le crux, en partant en H4, tandis que la voie ne compte que quatre points pour 15m... Le Lendemain, rebelote, mais en moule intégrale cette fois-ci, dans Bilouttin, un 7b+ plus dur que certains 7c+ du coin, que je fus le seul à enchaîner, mes collègues préférant le non-enchaînement éthique à la perspective d'une coche au goût amère. Moi de toute façon avec mes dents pourries, j'ai toujours un sale goût dans la bouche, alors vous savez des fois il vaut mieux lâcher prise, céder aux sirènes de la détente et grimper sans se prendre la tête.