mardi 28 mai 2013

La parenthèse enchantée



Marre, on en avait marre de cette météo, de toute cette pluie, de ce sale temps indigne de mettre un chien dehors, dans la continuité d'un hiver exceptionnellement long et rigoureux pour les grimpeurs. Alors comme tout le monde, devant la difficulté, nous avons déserté, nous avons fuit le ciel gris pour retrouver ce ciel bleu qui nous fait tant défaut en Savoie. Profitant du viaduc du "8 mai", une nouveauté 2013, c'est avec femme, enfants, copains, parrain et tata, alias BenJ renommé quicky durant le séjour et Elo que nous nous dirigeâmes dans le Sud. Les Alpilles, LaCombe connait bien mais elle est toujours ravie d'y retourner pour tâter le calcaire gréseux si particulier de Fontvieille, de se faire mal à l'égo dans les dalles de Mouriès, ou encore de brasser des bacs sur la falaise voisine de Venasque.


Les joies d'un départ en vacances commencent toujours par les bouchons autoroutiers. Soso ne pouvant résister à l'appel d'un tourisme de beauf', c'est-à-dire depuis la voiture, elle nous fit passer par les RN d'Ardèche pour contourner les difficultés. Hélas pour nous, elle est la seule à ne pas savoir que lorsque l'autoroute est bouchée, toutes les autres routes le sont aussi, le bison ayant prévu une journée rouge écarlate... Peu importe l'heure d'arrivée, nous étions décidés à rentabiliser le trajet en grimpant au plus proche de la location. Mouriès était alors désigné. Cette falaise, à la renommée mondiale, à la rouste mémorable, à la difficulté légendaire devait assurément nous calmer de l’excitation engendrée par le voyage.





Un autre avantage avec Mouriès, c'est la proximité entre le premier secteur et le parking. Certes ce n'est pas le plus beau, mais il permit à la joyeuse troupe de grimper quelques lignes, tout en surveillant les "enfants"  à deux roues de Quicky et Tata Elo. Niveau escalade, on pourra relever la performance de ce dernier en faisant, à vue, un 6b, ou encore celle de Tata Elo dans un 5b voisin. De mon coté, pas de surprise, l'escalade est tellement exigeante qu'il fallut me contenter d'un 7a+, répondant au doux nom d'Espace courbe, comme meilleure performance. Finalement, c'est encore Tata Elo qui résume le mieux la situation, par un petit geste que tout le monde peut comprendre.

                                                

                                               

Hors de question de retourner à Mouriès, le groupe était formel. Zut alors, moi qui voulait me déchirer la peau sur tous les 8a!!! La voie de la sagesse avait parlé, nous irions donc à Fontvieille, pour retrouver la famille Vigier, venue également dans le coin, pour les mêmes raisons que nous. C'était en effet la falaise idéale pour dérouler dans le 6ème degré, tout en étant protégé du mistral et en offrant un gigantesque bac à sable aux enfants, sujet aux premiers amours. La première journée se déroula au secteur de l'Hom de la Lecque pour une reprise du touché gréseux. Quelques voies valent vraiment le coup dont, Encéphalopathie en 7a+ et le 6c voisin qui donna du file à retordre à notre bon vieux Quicky, plus habitué à faire fonctionner son muscle cérébral que ses deux biceps. En fin de journée, je trouvais la motivation de faire déménager la "petite" troupe vers un autre secteur, plus calme, où se trouvait mon projet du séjour : Pommade anti-acmé. Ce pauvre 8a m'avait laissé de bons souvenirs lors d'une précédente visite et cette fois avec le vent de la collante, je sentais l’enchaînement réalisable. De plus, chers amis grimpeurs et parents, vous pourrez faire balancer votre progéniture dans les airs de la plus belle des manières. C'est aussi valable pour les plus grands qui voudraient se décoincer le slip ou le string. Tata Elo n'a pas voulu, elle ne portait pas de culotte!!!






Il fallut attendre le lendemain pour que j'arrive à enchaîner ce bloc encordé en 8a, poussé par les encouragements d'AK, d'Adri et des locaux. Il faut dire que les conditions étaient excellentes pour un mois de mai. Pour les deux "sudistes", les prises sablonneuses ainsi que l'affluence d'enfants de tous âges et de tous comportements rimaient avec démotivation et fuite vers le bistrot le plus proche afin de profiter de la quiétude d'une terrasse ombragée. Il faut dire qu'avec Chipies en 7a+ difficile de garder une bonne image de la falaise. En effet, vous serez amenés, à plusieurs reprises, à tirer sur des prises sablonneuses franchement douteuses, pour passer la première partie de la voie. Pour AK c'était une bouse, Adri se demandait ce qu'il faisait encore ici, et moi je bourrinais comme un fou pour enchaîner et terminer cette belle journée.








Le lendemain ce fut repos mais de courte durée, nous n'étions pas descendus pour enfiler des perles. Deux heures de plage à mater les Nabila nous suffisent largement, après il faut passer à l'action, les hommes n'aimant pas trop rester sur leur faim. Comme soulagement, une petite session de volume s'imposait. Au programme un objectif simple : faire toutes les voies en 7a qui me restaient à faire. Direction la droite de la falaise pour faire L'Arlesienne sur son 31, puis La Tarasque, décaler la corde dans Carmen Gitane sans filtre, un  poil plus dure et ratée la veille. Enfin les bras morts, je trouvais l'inspiration dans Mi figue mi raisin. J'avais mon quota de 7a pour l'année entière. Il ne restait plus qu'à rentrer "at home" pour préparer le barbecue pré-départ.








Le départ se fit rapidement, tout le monde avait hâte de profiter de cette dernière journée. Les jeunes amoureux préférèrent chevaucher leurs fougueux destriers quelques part dans la Drôme alors que notre petite famille voulait tester la balançoire de Venasque. ceci n'était évidement qu'un prétexte pour retrouver AK et Cath, vus trop brièvement à Fontvieille. Un journée remise en cause, à tous les niveaux. L'escalade en dévers c'est dur, il faut s'y habituer mais c'est tellement bon!!! Au menu, une nouvelle voie au secteur "bord de route", Homeland en 7b+ pour un effort de conti avec une feinte au dernier mouvement! Quand on a pas de force, il faut ruser... Remise en cause familiale, je grimpe trop parait-il? Plusieurs séances de 3h en famille pendant les vacances remplacent-elles une grosse séance seul avec les copains? Comment faire pour ne pas régresser sachant que la météo nous empêche aussi de sortir? AK nous fera bientôt un petit précis pour jeune papa, sans oublier d'être le plus exhaustif possible et de penser à tous ceux qui grimpent dans des régions sans soleil. Une sorte d'annuaire des falaises avec des solutions, des méthodes pour contenter chacun, l'emploi du temps parfait, une liste du matos à prendre au pied des falaises... 



Comme à l'aller, le retour se fit dans les bouchons, pour finalement retrouver la pluie... Cette virée aura vraiment fait du bien. Une question demeure : quand est-ce que l'on déménage?

lundi 6 mai 2013

Objectif Challes



On connaît tous la BD d'Hergé, Objectif lune, relatant les aventures de Tintin en partance pour la lune. Comme toujours chez LaCombe nous aimons remanier le scénario, le rendre proche du grimpeur et c'est ainsi que Victor reprit le rôle de Tintin, la houppette au vent, et moi, celui de Haddock, le vieil aviné, toujours bougon et jamais content!!! Notre base secrète de recherche atomique sera donc la merveilleuse falaise de Challes, tapie au cœur d'une épaisse végétation, barrée par les ronces telles des barbelés protégeant les intrusions étrangères. En effet, il faut posséder un "pass" pour rendre l'accès accessible aux plus fins bartasseurs des bois. Ça tombe bien, chez LaCombe 45 minutes de marche représente le temps moyen d'accès à une falaise et la petite dernière en date ne dérogera pas à cette tradition. L'objectif : Les pies cotent l'âge des voies, un 8b bien rési et convenant à merveille à notre jeune reporter.



Une fois le début trouvé, il ne vous restera plus qu'à vous battre dans la terre, glissante en cette saison, pour arriver là-haut. Une tenue de cosmonaute serait néanmoins forte utile afin de prévenir toutes taches d'un marron suspect sur vos pantalons E9 flashy et tout juste sorti de la machine. Pour les nenettes, je ne peux que conseiller de monter en petite tenue, si vous êtes adeptes des bains de boue. Vous voulez joindre l'utile à l'agréable mesdames? No problem, allez y en bikini, E9 si vous voulez, c'est l'endroit idéal pour les combats de boue et cela ravira ces messieurs de regarder un remake d'une épreuve machiste de fort boyard en direct...





Après moult péripéties, comme dans toutes bonnes aventures, la base approchait, l'objectif était sec, la motivation gagnait peu-à-peu notre jeune homme qui se voyait déjà sur la lune...enfin au relais. Comme avant chaque échéance, les aventuriers relâchaient la pression pour mieux se concentrer par la suite.




La voie est belle, 20m dans un mur sculpté pour 4-5 m d'avancée avec de petites prises qu'il faut serrer comme un porc, deux zones de décontraction, une base en somme. Le soleil ne pointait pas encore, il restait du temps pour une montée de calage servant aussi d'échauffement. Une heure après, avec le petit vent qui survient juste avant le soleil, c’était le bon moment. Mon reporter s’élançait, une escalade précise, rodée aux mouvements complexes du bas. Première pause à la troisième dégaine pour se remettre des gros blocages du départ. La machine se remit en marche pour une section sur bonnes réglettes jusqu'à la bonne décontraction sur la rampe de plat 5 mètres au dessus. Les minutes passaient. Il faut impérativement temporiser à cet endroit car après il n'y a plus d'issue, le prochain arrêt ce fera au relais. C'était déjà reparti, il grimpait vite dans la traversée, ne perdait pas de temps sur les mauvaises prises, mousquetonna l'avant dernière dégaine, puis développa main gauche vers une petite prise, développa de nouveau vers la prise main droite du crux, poussa un cri en allant chercher une meilleure règle avec sa main gauche. Ça allait vite,  il était presque en haut mais les signes de fatigues étaient visibles, les pieds étaient moins précis, désunis, dans la confusion il criait "ça va faire" comme pour se rassurer. Deux mouvements plus tard, il était au relais, explosé, mais heureux d'avoir réaliser son second 8b, d'avoir été un court instant sur la lune.



L'objectif atteint, notre reporter se retourna donc vers un autre challenge à la hauteur de son talent, me mettre un but dans le 8a+ de Mort au chintok, une voie bien bloc avec un zeste de résistance dans laquelle je m'étais lancé afin d'occuper ma piteuse journée. Hélas, le soleil jouait maintenant contre nous et chaque petites arquées tenues trop fortement nous pelaient consciencieusement le peu de peau qui nous restait sur les doigts. Un flop de plus. Néanmoins la voie est vraiment sympa à grimper pour celui qui a du gainage et des doigts!!!

Pour le moment, laissons cette base secrète replonger dans l'oubli jusqu'à l'hiver prochain pour de nouvelles aventures verticales.